Le 13 décembre 1978, Jean-Marie LEBLANC qui fut coureur cycliste professionnel avant de devenir journaliste à l’Equipe puis directeur du Tour de France, écrit à l’occasion du Championnat d’Europe des super-plume qui va opposer à Brescia (Italie) l’Italien Natale Vezzoli, tenant du titre au Français Charly JURIETTI : « Le grand public ne comprend pourquoi en boxe, ce ne sont pas les champions de leur pays qui disputent automatiquement les Championnats d’Europe et les champions continentaux les Championnats du monde ainsi que le voudrait le sens le plus élémentaire ». Et il ajoute « que dans les arcanes de ce sport énigmatique, entre tous, il arrive fréquemment que la logique s’efface avec élégance derrière les objectifs commerciaux du moment. Et tout le monde y trouve son intérêt ». Remarquez que la boxe française peut bénéficier de ce genre de passe-droit puisqu’avant JURIETTI, Gilbert COHEN qui n’était pas champion de France, avait bénéficié du désistement du tenant Claude MARTIN, pour avoir une chance européenne et devenir ensuite à la surprise générale, champion d’Europe des super- welters. JURIETTI n’est pas champion de France des super-plumes puisqu’il a été battu quelques semaines auparavant à Papeete par le Tahitien APEANG . L’Italien ne souhaitant pas se déplacer à Tahiti, a préféré retenir JURIETTI. Il va donc s’agir d’un championnat d’Europe par dérogation. JURIETTI n’est pas un boxeur connu des médias. Originaire de Valence, ville dans laquelle il est employé municipal, JURIETTI (26 ans) se voit ainsi offrir une superbe chance. Pourtant VEZZOLI n’est pas le premier venu puisqu’il a déjà défendu à six reprises son titre européen. Les deux hommes se connaissent bien puisque lors d’un combat sans enjeu, ils ne peuvent se départager, l’arbitre donnant match nul. Cette catégorie des super-plume est considérée comme bâtarde et surtotu récente puisque sa création remonte à 1970. VEZZOLI a succédé au palmarès au Français Roland CAZEAUX. JURIETTI ne partait pas favori et pourtant, il allait réussir un superbe combat qui, du reste allait à la limite des douze reprises. A la fin, le visage de l’Italien était tuméfié tandis que JURIETTI semblait frais comme un gardon. Le combat avait certes été serré mais normalement, JURIETTI méritait de se voir déclarer vainqueur. Malheureusement, ce jour là, un juge danois qui ne put arriver à l’heure fit en sorte qu’il incombait à l’arbitre seul de donner une décision. Cet arbitre était suisse et il s‘appelait M. MARTY. Celui-ci eut peur des réactions du public s’il avait déclaré le Français vainqueur. Il devait du reste l’avouer un peu plus tard lors de la réception. Le lendemain, la presse italienne titrait : « VEZZOLI a perdu la tête mais garde sa couronne . JURIETTI possédait au moins deux points d’avance. VEZZOLI ne chercha pas à en rajouter avouant simplement « que JURIETTI avait été le plus valeureux et difficile des challengers que j’ai rencontrés .» JURIETTI était abattu par autant d’injustice mais il savait bien qu’en Italie « il faut mettre ko son adversaire pour être certain de l’emporter ». N’étant pas champion de France, JURIETTI savait aussi qu’il devrait repartir de zéro pour retrouver un jour une chance européenne. Même APEANG devait patienter d’autant qu’en dépit d’une bourse très élevée, l’Italie ne souhaitait pas venir à Tahiti. Dans un premier temps (mai 1979), JURIETTI devenait un peu plus tard champion de France en battant chez lui à Valence le Tahitien APEANG. Pour conclure sur ce championnat d’Europe à Brescia, Jean Marie LEBLANC titrait dans le journal l’Equipe : « Le mal fait à la boxe ».

Lionel HERBET